Les journalistes sont-ils objectifs ?

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Je partage ici un texte qui se présente comme une réflexion faite à moi-même et pensée par écrit. C’est la question ci-dessus qui a motivé cette réflexion et quelques recherches pour trouver des réponses. Je n’avais pas prévu de partager ce texte, qui date du 18 juin 2020 ! Je le partage tel que je l’ai rédigé il y a plus d’un an, avec les imperfections qui vont avec.

Les journalistes sont-ils objectifs ?

Non, il est impossible d’être objectif. Il reste toujours un humain derrière des mots écrits par un journaliste. Cependant, un journaliste se doit d’être neutre, du moins le plus possible. Y parviennent-ils ?

Attention, je ne vise personne ici, personne en tant qu’être vivant. Je me questionne, voilà tout, et je vous invite à faire de même. Non pas pour rester dans un scepticisme absolu, mais plutôt pour prendre de la hauteur sur la société dans laquelle on vit… et que l’on a du mal à comprendre. Où est la vérité ? Quelle est-elle ? Où la trouver ?

Je n’ai pas la réponse, mais je réponds tout de même ceci :  il faut à tout prix arrêter de croire tout et n’importe quoi, et arrêter de mettre sa confiance aveuglément dans des autorités qui, parce qu’elles ont le monopole de la parole, seraient plus fiables en ce qui concerne l’explication de la réalité du monde et de son actualité.

Je précise que même si je donne l’impression (peut-être) d’attaquer le milieu journalistique, et de m’en prendre aux journalistes, en réalité, je les admire beaucoup, et c’est un métier qui m’a très longtemps attiré. Parfois, ils peuvent m’énerver, d’autres fois, m’impressionner, il y en a même que j’adore (je ne citerai pas de nom). J’ai bien conscience que c’est un métier extrêmement difficile, tant par les pressions gouvernementales, sociales (ou populaires), sans oublier la dimension personnelle, parce que malgré tout, ce sont des êtres humains qui se cachent derrière ces jolis costumes et ces make-up discrets.

Même si c’est tendance, il est très difficile de démonter la parole d’un journaliste. La plupart du temps, le vocabulaire employé, le ton des phrases, l’expression même du visage semble démontrer un effort de neutralité, proche de l’objectivité. Or, cette neutralité ne peut-elle pas être justement recherchée, pour faire passer un message orienté dans une enveloppe verbale cachée derrière une apparente neutralité ?

Ce sont des questions que je me suis posées ces dernières semaines, en regardant d’abord d’un œil distrait les journaux tv, en lisant des articles, portant sur l’actualité. Puis, mes réflexes de littéraire ont petit à petit pris le dessus, comme si mes outils d’analyses s’activaient en arrière-plan, pendant que j’écoutais ou lisais les infos défilées.

Ce qui m’a fait bondir, ce sont les analyses que l’on peut trouver, à propos du discours dit « complotiste ». Je les ai trouvé très intéressant, brillants même, mais celles-ci -et leur conclusion – ont fait apparaître une lacune dans le discours journalistique : les journalistes analysent et interprètent librement le discours des autres, de ceux qui ne disent pas comme eux de manière générale, mais ne semble jamais analyser leur propre discours. Alors, d’accord, ils n’ont pas le recul nécessaire. Mais quand même, cela donne l’impression que le discours journalistique se suffit à lui-même, qu’il est même le langage au-dessus des autres, la langue de l’information objective par excellence, et que, par conséquent, le journaliste se donne le droit d’analyser toute forme de discours… Mais qui prend la liberté de poser un regard critique sur les mots que le journaliste emploie ? Les « complotistes », eux-mêmes discrédités par les journalistes ? C’est le serpent qui se mord la queue…

Qui donc prend la liberté de poser un regard critique sur les mots que le journaliste emploie ? Il y en a, mais ils ne sont malheureusement pas médiatisés. Je précise d’ailleurs que quand je parle de journalistes et de journaux, je reste focalisée sur la presse grand public, ceux que l’on appelle les médias dominants : chaînes de télévisions principales, journaux les plus connus, radios grande écoute, etc. Je parle de ceux que l’on entend partout, tout le temps, les plus écoutés concernant la transmission de l’information. 

Je précise une fois de plus que je ne mets pas tous les journalistes dans le même panier ! Par exemple, dans la vidéo suivante, on voit une journaliste démonter le travail des médias traditionnels. Celle-ci accuse les médias occidentaux de mentir, à propos de la Syrie, et un accusé lui demande de s’expliquer : pourquoi mentiraient-ils ? « pourquoi ne devrions-nous pas croire à tous ces faits absolument vérifiables que nous voyons sur le terrain ? » 

ONU : une journaliste démonte en deux minutes la rhétorique des médias traditionnels sur la Syrie :

Il est vrai que si l’on croit au discours des journalistes, c’est que ceux-ci s’appuient sur des sources, des chiffres, des noms… bref, tout ce qui peut constituer des preuves, contribuant alors à augmenter la confiance du public. Le problème soulevé dans la vidéo est le suivant : ces faits vérifiables seraient tout simplement faux. Un mot qualifie tout cela : mensonge.

Le problème est le suivant : malgré ce que l’on pense, les médias ne sont pas réellement des acteurs de terrain, et même s’ils vont sur place, questionner des gens, etc. ils sont d’abord soumis à un filtre, celui des bases de données (ex : https://www.afp.com/ ) dans lesquelles tous puisent. Je ne vais pas trop m’avancer sur le terrain, car je ne suis pas journaliste. Mais il suffit de constater que tous les médias dominants nous servent à peu près le même plat tous les jours, avec quelques petites variations quand même, selon le bord politique du média par exemple. Les personnalités médiatisées sont les mêmes, les interviewés aussi, les infos se ressemblent.

Le problème ne viendrait pas du fait que les journalistes ne sont pas objectifs, mais du fait que les sources sur lesquelles ils s’appuient ne le sont pas. Encore une fois, ce n’est pas le cas de tous. Peut-on poser l’hypothèse qu’il existerait une sorte de journal de fonds dans lesquels chaque journal puise l’information, l’adaptant ensuite selon les bords politiques de chacun ? Finalement, cette querelle entre médias de différents bords politiques serait une pseudo-querelle, qui cache un problème grave : celui de l’information tronquée à sa base. 

On pourrait objecter : oui mais les journalistes se fondent sur des sources vérifiables et souvent accessibles à tous, sur des témoignages de personnes réelles… Certes ! et c’est de ces données-là que  je veux parler : sont-elles réellement fiables? Sont-elles vraiment le reflet de la réalité ? Et si elles ne le sont pas, à quel pourcentage un média s’appuie-t-il sur de telles données ?

Le problème n’est pas que les journalistes peuvent se tromper (car c’est tout fait normal ! ), le problème est qu’ils ne savent peut-être même pas qu’ils se trompent, ou plutôt, qu’ils sont eux-mêmes trompés, orientés dans leur recherches, dans leurs discours, dans leurs réflexions.

Par manque d’honnêteté et d’objectivité, je parle aussi des orientations que prennent les plateaux tv, par les invités experts (ou pas). Pourquoi avons-nous presque toujours le même son de cloche ? Plus particulièrement pendant la crise du coronavirus, si l’on prend n’importe quel journal tv, on remarque que souvent les mêmes personnes étaient invitées à témoigner, à partager leur expertise, etc. Pourtant, le travail du journaliste n’est-il pas, à l’origine, d’arriver à faire prendre du recul à ceux qui le suivent, à faire prendre du recul notamment par rapport aux discours officiels, issus directement du gouvernement ? Or, je suis désolée, mais l’opposition n’a quasiment pas été entendue, voire pas entendue du tout, encore moins lors des heures de grandes écoutes. Petite, mais alors très petite exception faite au professeur Raoult : oui, car si on ne lui avait pas donné la parole, la direction que les journaux prend aurait été beaucoup trop évidente. En n’invitant pas l’opposition, par exemple les anti-vaccins, les anti-confinements, les journaux prennent partie, forcément. Ils prennent le parti de n’inviter que les pro-vaccins, que les pro-confinements, pour ne citer que ces deux exemples. 

Alors, dira-t-on, il ne vaut mieux pas inviter ces hurluberlus bobos hippies aux cheveux longs (on est dans le cliché forcé là quand même), car leur apparence physique et leurs discours farfelus sont bien la preuve que ce sont des propagateurs d’informations « bullshit », de fake news. Pardon mais, si le travail des journalistes étaient vraiment neutre, ils inviteraient des personnalités de TOUS LES BORDS. Ensuite, je vous demande de vous poser la question : peut-on être réellement sûr que les fake news viennent seulement d’un côté, c’est-à-dire du côté opposé aux médias, et que seuls ces derniers seraient capables d’apporter la parole véritable, l’information pure issue de la source limpide de la vérité ? hmm, sachant que souvent que ces informations de source soit-disant fiables sont nourries à coup de grosses sommes, je me méfie… beaucoup, vraiment beaucoup. 

De plus en plus de journalistes semblent être conscients de cette défiance dont ils sont la cible auprès du grand public ; et en effet, ça ne doit pas être facile à vivre ! Je suis aussi consciente que certains s’en prennent véritablement plein la gueule, étant souvent au cœur de l’action, du coup violentés, agressés, détestés même. 

« Mes amis disent que les médias mentent » : un documentaire analyse la détestation des journalistes :

L’opinion publique est ainsi à la fois méfiante des journalistes, voire haineuse à leur égard, mais pourtant, c’est toujours à travers les médias dominants que l’information est la plus écoutée. C’est paradoxal. Pour le dire autrement, les médias si détestés et haïs restent la principale source d’information d’une majorité de personnes. 

Quand ces médias se retrouvent face à un discours qui va à l’encontre des infos qu’ils véhiculent – qu’il s’agisse d’autres médias ou de youtubers, de personnes lambdas divulguant d’autres infos – les dominants parlent presque tout le temps de controverse, de complotisme, de conspirationnisme, comme si eux-seuls savaient la vérité, et qu’ils étaient dans un combat contre les autres formes de pensées. Et je trouve que c’est un problème, qui va contre la liberté d’expression. Les médias dominants ont toujours ce monopole de l’information, mais la méfiance envers ceux-ci augmente, en réponse avec beaucoup d’autres informations diffusées par d’autres biais, et allant à l’encontre de la pensée unique que l’on entend et lit sur les médias principaux.

On croirait même que la parole journalistique est sacro-sainte, et qu’ils ne peuvent pas se tromper. Or, ils ont eux-mêmes droit à l’erreur, comme tout le monde. Cependant, si d’autres personnes, moins connues, disent qu’ils mentent, ce seraient les accusateurs qui se trompent forcément…

Je ne sais pas si vous me suivez. Ce que j’essaie de dire, c’est qu’il y a une véritable scission entre le discours journalistique dominant, et le discours des autres. Le problème, c’est que chacun veut avoir raison. L’autre problème, c’est que les médias principaux bénéficient d’une écoute plus grande, et que par conséquent démonter le discours averse est plus simple. Du moins, amener plus de personnes à les suivre est plus simple, puisqu’à la base, c’est toujours eux qui ont le monopole de l’info.

Alors, pour répondre à ma question initiale : non, les journalistes ne sont pas objectifs. Mais ceci n’est pas nouveau, car chaque être humain a un avis subjectif, même s’il essaie d’être neutre. De plus, un journaliste doit forcément avoir un angle d’attaque quand il diffuse une information. Il faut en avoir conscience.

Le problème (je dis beaucoup ça, je sais), c’est que le grand public qui écoute le JT comme un catholique la messe n’en a pas conscience. Le discours journalistique est un discours subjectif, orienté par un angle de vue. Cependant, tous les indicateurs semblent témoigner de l’objectivité et de la neutralité du journaliste. La subjectivité est dissimulée, l’angle de vue ultra-serré. Et ça, le public ne le voit pas. Le journaliste est quelqu’un qui possède un solide bagage rhétorique : autrement dit, il sait faire passer un message derrière un discours.

Si je vous dis tout ça, ce n’est pas pour vous dire de ne plus regarder les médias dominants. Non, ce qu’il faut s’entraîner à faire, c’est les regarder avec discernement. I faut essayer de voir l’humain derrière le journaliste, et les enjeux, les intérêts du journal derrière l’information diffusée. Pour appuyer mon propre discours sur des analyses, je vais me pencher de plus près sur la rhétorique journalistique, car il y a des choses à dire. Ce qui me fait penser à quelque chose encore : quand un discours ne plaît pas à un média dominant, sa principale arme est de démonter ce discours à coup de rhétorique. Par exemple, le discours complotiste jouerait sur la peur des gens pour servir ses propres intérêts. Pourquoi pas, mais qui remet en cause le discours journalistique ? Les complotistes eux-mêmes. La boucle est bouclée. Serpent qui se mord la queue, le retour. On ne voit pas TF1 faire une analyse savante de son propre discours ! La rhétorique médiatique ne se remet pas en question ! et c’est dommage. Les seuls qui la remettent en cause sont ceux démontés par le discours dominant. Comment peut-on alors aller contre ça ? C’est très difficile, mais c’est le parti que je me donne : montrer que les médias dominants orientent leurs messages derrière un discours qui a toutes les apparences de la neutralité, mais qui est en réalité totalement orientée.

Je vais faire une objection à mes propres paroles : si, il est possible qu’un média pose la question de l’objectivité du journalisme. Il est à noter tout d’abord que ce ne sont pas des articles que l’on voit à la Une des journaux, ni aux heures de grande écoute. Et aussi, tous les articles qui étudient la possible objectivité ou non des journalistes restent, à mon avis, bien superficiels, se concentrant sur des considérations qui ne nous avancent pas beaucoup : non, le journaliste ne peut pas être objectif, car il est d’abord humain ! L’analyse de l’objectivité se fait par la considération de la manière de transformer une information en discours (qu’il soit écrit, télévisé, radio, etc.), et non sur la manière de traiter l’actualité, avant même de penser à la diffuser. Je sais, vous pouvez me renvoyer la critique… en attendant la suite dans un prochain épisode !

Sources :

https://www.clemi.fr/fr/cles-medias/les-journalistes-sont-ils-objectifs.html

http://presse-ecole.blogs.ouest-france.fr/le-journaliste-est-il-objectif/

https://larevuedesmedias.ina.fr/pourquoi-une-information-ne-sera-jamais-totalement-objective

http://atelier.rfi.fr/profiles/blogs/le-journaliste-peut-il-tre-objectif

http://lodel.irevues.inist.fr/cahierspsychologiepolitique/index.php?id=914

https://www.persee.fr/doc/comin_1189-3788_1991_num_12_2_1541

https://journals.openedition.org/edc/3268

https://www.sciencepresse.qc.ca/actualite/detecteur-rumeurs/2017/11/09/objectivite-saint-graal-journalisme

https://www.marianne.net/debattons/tribunes/pour-une-subjectivite-honnete-des-journalistes

https://www.mediaeducation.fr/fr/Se-documenter/lire/Les-sources-d-info-du-journaliste/74.htm

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