Voici une retranscription d’un extrait d’une radioscopie (1977), où Jacques-Yves Cousteau expose sa vision de la vie :
« L’océan, c’est la vie. C’est-à-dire que notre vie est intimement liée à la vie de l’océan, voilà. C’est ça, pour moi, la seule chose qui compte. Tout le reste est secondaire : tirer du pétrole, des trucs, pourquoi faire ? pour augmenter de 5% la production… rigolade ! Il faut maintenant savoir parler de choses sérieuses, c’est-à-dire la vie de nos enfants, de nos petits-enfants, le bonheur de vivre, la qualité de la vie, la joie, le rire, les chansons, les fleurs, les oiseaux, voilà ce qui compte ; tout le reste, la production industrielle, on s’en fout !
— Mais comment vous concevez la qualité de la vie ?
— Ben la qualité de la vie c’est ça, c’est le bonheur des gens, c’est-à-dire le sourire…
— … la disponibilité.
— Mais promenez-vous à Paris et ouvrez les yeux ! Vous n’avez que des gueules fermées ! Les gens regardent la pointe de leur chaussure, vous croyez que c’est ça le bonheur ? c’est ça que nous a apporté la civilisation d’aujourd’hui. Il faut changer les raisons d’être, au lieu de chercher toujours à produire plus en quantité il faut produire plus en qualité ; c’est ça la seule, c’est ça le fond du problème. Pourquoi est-ce qu’on les oblige à courir, pourquoi est-ce qu’on les oblige à prendre une voiture quand ils viennent et à rester le matin sur l’autoroute pendant 2 HEURES, pare-choc contre pare-choc, et quand ils arrivent ils sont furieux, ils rentrent chez eux ils flanquent des taloches aux mômes, etc. c’est pas, c’est vraiment ridicule, alors qu’avant mais y’a pas longtemps, je me rappelle quand j’étais gosse, que j’allais en classe, je bavardais avec les épiciers, avec la crémière, etc. ils avaient le temps ! Aujourd’hui ils ont plus le temps ; il faut qu’ils remplissent des fiches, il faut qu’ils fassent leur comptabilité, ils faut qu’ils paient leur tiers provisionnel, ils faut qu’ils s’occupent de la sécurité sociale, leur môme se fout.. ils faut qu’ils aillent le défendre auprès du proviseur parce qu’on les CLASSE maintenant dès qu’ils sont tout petits dans des catégories, comme si on pouvait classer les uns dans des catégories. Voilà les excès dans lesquels on est tombé, c’est grotesque !
— La sagesse nous conduit donc à réfléchir ?
— La sagesse nous conduit à simplifier…
— Plutôt la lucidité ?
— A simplifier notre vie, à la simplifier, à la dépouiller des inutilités. Alors, il faut le dire, et c’est la chance que nous avons, c’est de pouvoir suivre d’une façon évidente les dégâts de la qualité de la vie qui se propage aujourd’hui. »
J’ai ressenti l’envie de partager ce cours extrait avec vous, car je sens que cette vision de la vie sera de plus en plus bénéfique pour se sortir d’un système oppressant. Il n’est sans doute pas besoin de faire la guerre… mais peut-être, plutôt, d’arrêter de trop vouloir faire. D’arrêter de faire ce qu’on nous dit de faire. Il est temps d’être ce que l’on veut. Il est temps de revenir à l’essentiel, à un mot que Cousteau répète, à la simplicité.
Alors, je n’ai pas envie de dire que c’était mieux avant. Je ne sais pas comment c’était avant ; du moins, je ne l’ai pas vécu. Par contre, je pense que la décroissance est paradoxalement une forme de progrès : c’est même le futur qui nous attend. Décroissance ne signifie pas, ici, revenir à l’âge de pierre. Non, la décroissance signifie d’arrêter de vouloir la croissance industrielle à tout prix, au détriment dune croissance intérieure.
Constamment dirigés vers le développement de la société, nous oublions et nous n’avons plus le temps d’évoluer nous-même ! Nous pensons que c’est un travail, des études, la fondation d’une famille ou la construction d’une maison qui va nous faire grandir… Or, rien ne nous fera grandir si l’on ne décide pas de se changer également nous-même ! Nous sommes les fondations de notre propre vie que nous bâtissons, alors arrêtons de vouloir construire quoi que ce soit sur un sol fragile.
Pas besoin de faire une retraite de trente ans dans une grotte ou quoi que ce soit d’autre de contraignant… je pense que l’essentiel est de se poser les bonnes questions : qu’est-ce que je veux vraiment ? qu’est-ce que j’aime ? dans quoi et où est-ce que je me sens bien ? Selon les réponses, inutile de s’acheter un palais au bord de la mer si, finalement, nous n’avons jamais été plus heureux que dans cette cabane construite à la campagne… et inversement.
La décroissance, le retour à la simplicité, c’est plutôt prendre en compte ce que l’on a déjà construit, inventé… mais pas pour détruire (tout) le progrès : il faut savoir mieux l’utiliser, savoir s’en servir consciemment : l’utiliser pour vivre, et pas pour faire du bénéfice. Le progrès, l’avenir, ce n’est donc pas (essayer de) vivre en fonction d’un monde extérieur qui va de plus en plus vite, car il s’agirait maintenant d’adapter ce monde extérieur à notre bonheur. Et si celui-ci dépend de l’argent et du pouvoir sur autrui, c’est qu’il est temps de se poser des questions…
Jacques-Yves Cousteau était un officier de la Marine nationale, un explorateur océanographique, auteur de livres, participant et réalisateur d’un grand nombre de films et de documentaires. Pour en savoir plus sur ce monsieur, c’est ICI.
Trés joli extrait du commandant Cousteau. Il avait déjà compris… Et il a raison. Arrêtons de penser croissance, productivité, chiffre d’affaire; pensons bonheur , moment présent, sourire, nature… Il me tarde d’être dans un monde simple. Ah, ça commence par moi ? Ok. 😊
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Merci pour cet article. J’ai particulièrement aimé ce passage :
« Constamment dirigés vers le développement de la société, nous oublions et nous n’avons plus le temps d’évoluer nous-même ! Nous pensons que c’est un travail, des études, la fondation d’une famille ou la construction d’une maison qui va nous faire grandir… Or, rien ne nous fera grandir si l’on ne décide pas de se changer également nous-même ! Nous sommes les fondations de notre propre vie que nous bâtissons, alors arrêtons de vouloir construire quoi que ce soit sur un sol fragile. »
Voici à quoi celui-ci m’a fait penser :
Durant une conversation avec mon boulanger, celui-ci me partageait l’amertume qui lui restait de son divorce.
Je le sentais très affecté et il transpirait une colère qui cachait probablement un profond mal-être.
Revenons quelque temps en arrière.
Notre vaillant boulanger essuyait la farine de ses mains pour les recouvrir de poussière de ciment : il construisait une maison pour lui et sa femme.
Il enchaînait ces journées ainsi : de 4h à 18h à la boulangerie et de 20h à minuit sur le chantier.
Le fruit de son dur labeur finit par payer et il put profiter avec sa femme de sa belle réalisation.
Cependant, leur couple était fragile…
Il m’expliquait que lors de la définition des clauses du mariage, il avait opté avec sa femme pour un partage des parts.
Concrètement, cela signifiait que la boulangerie et la maison appartenaient aux deux partis du couple.
… Le couple fragile n’a pas tenu et, au moment de rompre, il a donc fallu partager en deux les biens.
Notre boulanger laissa la maison à sa femme pour garder sa boulangerie.
Lorsqu’il me racontait son histoire, je pouvais sentir la haine viscérale qu’il éprouvait pour son ex-femme :
« Elle n’a rien foutu ! C’est moi qui ai construit cette maison de mes propres mains et là, c’est elle qui en profite pendant que moi, je trime. »
Au même moment qu’il me disait ça, il était en train de construire une nouvelle maison, pour lui seul cette fois.
Et ces journées s’enchaînaient ainsi : de 4h à 18h à la boulangerie et de 20h à minuit sur le chantier.
J’ai dit seul ? En fait, non, pas vraiment.
Il construisait sa maison pour l’abriter lui, sa haine et son mal-être.
Aujourd’hui, il se retrouve seul dans sa maison et travaille d’arrache-pied pour rembourser ses dettes.
Bien que je lui souhaite, je n’ai pas l’impression qu’il trouvera une autre femme.
Il n’en trouvera pas une, car les seuls mots (maux ?) qui tournent dans sa tête aujourd’hui sont dédiés à son ex-femme. Et ils ne sont pas jolis…
Pour ma part, je trouve admirable la démonstration de la résilience et de la persévérance que fait notre boulanger.
Cependant, utilisées à mauvais escient, celles-ci peuvent être le fruit de notre plus grand mal-être.
Il en revient à se demander dans quelle direction nous orientons notre énergie pour nous développer ?
Assurons-nous que le sol sur lequel nous bâtissons ne soit pas fragile.